mardi 6 octobre 2015

A la Ronde 1, on pousse du bois

Il y a un jeu de mot dans le titre (je dis ça pour ceux que ça amuse).

Après le petit-déj. avec le chief de la FIDE, nous descendons dans le hall de l'hôtel et tombons sur Ljubomir Ljubojević à qui ça n'a pas fait mal. Pour ceux qui ne connaissent pas Ljubo, il est devenu Maître International l'année de ma naissance, et Grand Maître l'année suivante. Il a battu des "amateurs" comme Karpov, Kasparov, Anand... Il va commenter le Grand Prix en direct pour les internautes du monde entier. Il est serbe et vit en Espagne. Je laisse Geoffrey Borg et Ljubo discuter, je file à la salle de jeu pour régler le millième petit détail.

à droite Miguel Illescas, à gauche Ljubomir Ljubojević (site officiel)

L'autre commentateur est le très talentueux Grand Maître espagnol Illescas. Je lui raconte qu'à l'époque où il jouait pour le club de Montpellier, Jean-Claude Loubatière, Président de la Fédération Française, et président de son club, m'avait dit qu'il était très fier que Miguel ait été soigné pour une blessure à son poignet, reconnue comme une "maladie professionnelle" de joueur d'échecs !

Retour au Casino de Monte-Carlo.
Il y a deux sortes de personnes à Monaco : celles qui ont de l'argent, et celles qui ont des badges. Moi, j'ai des badges.


Je passe des barrages de gens en smoking. Avec un badge et une cravate, vous pouvez rentrer dans Fort Knox.
Oh ! qui vois-je dans le salon blanc que nous devons traverser pour aller dans les salons privés ?


Maman Muzychuk et ses deux filles de 22 et 25 ans. Et qu'est-ce qu'elles veulent faire quand elles seront plus grandes ? ... Ah bon ? Vraiment ? ... Mariya est Championne du Monde en titre, et Anna n°4 au classement mondial ! Ooooppss
Félicitation mesdames.

Inspection de la salle, je fais changer une poubelle d'endroit... puis je la fais remettre à sa place initiale.
Voilà, il est l'heure d'aller déjeuner. Un radis et un verre d'eau plus tard, je reviens à la salle de jeu.
Un petit café pris à ma table d'arbitrage, je profite de l'architecture fin XIXe.


Je règle les pendules, ma collègue vérifient que les noms des joueuses correspondent aux places attribuées.
Les joueuses arrivent petit à petit par l'entrée des salons privés. Habituellement, ces salons servent pour des joueurs qui veulent éviter la publicité. La porte est à côté de la boutique Chanel, vous voyez ?
Cette entrée est ouverte de 14h à 15h. Les rondes commencent à 15h. Et si une joueuse arrive après 15h ? ... elle perd la partie.
Sévère ?
Le Grand Prix Féminin est une série de 5 ou 6 tournois dans le monde. A l'issue de ce Grand Prix, la première joueuse au classement participe à ... la Finale du Championnat du Monde, tout simplement.

Lancement de la ronde par le Président de la Fédération Internationale et le grand patron du Casino.
Visite surprise de la Présidente de la Ligue de la Côte-d'Azur, Martine Bolla et de la Présidente du Comité départemental des Alpes-Maritimes, Françoise Bressac. Les dirigeantes associatives se conjuguent aussi au féminin.

De temps en temps, pour distraire les spectateurs, je me lève de mon bureau d'arbitre et vais me servir un thé.


Les deux arbitres du Grand Prix. Anastasia Sorokina et moi (photo JM Pechiné. EE).
L'un de nous deux doit toujours être présent dans la salle. Anastasia s'étant absentée, je suis seul. Je décide de faire quelque chose de dingue, un geste fou ! Rappelez vous James Dean dans "La Fureur de Vivre" : je cligne des yeux. Oui, je sais, cela n'a duré qu'une fraction de seconde, mais c'était suffisant pour qu'un drame se produise. Mes yeux sont à nouveau ouverts, et je vois la n°4 mondiale, Anna Muzychuk, qui s'est approchée de l'espace boisson. Elle a dans ses mains une bouteille d'Evian, mais malgré tous ses efforts, elle n'arrive pas à tourner le bouchon. Je glisse discrètement entre les échiquiers, et j'arrive : tel Arthur qui retira l'épée du rocher, je retire le bouchon de la bouteille d'Anna. Elle peut boire, elle est heureuse, ... non, vraiment, ne me remerciez pas, j'ai accompli mon devoir... juste mon devoir, je n'en tire aucune gloire.
Quelques minutes avant le drame, Anna - à gauche - avait sagement pris du jus d'orange (site officiel)

Aujourd'hui, ronde 4 (et oui, je prends du retard dans la rédaction de ce blog), la même aventure est arrivée à Natalia Zhukova, Championne d'Europe 2015. Je suis intervenu pour tourner le bouchon, et ainsi éviter à nouveau le drame. Prévention est mon 2e prénom.
Commentaire d'un monsieur dont je ne donne que les initiales (J.M.R.) : "Cela justifie la présence d'un arbitre-homme pour ce tournoi féminin"

A la Une du site de la Fédération Internationale, on devine ma silhouette au milieu de la photo de gauche.

Site officiel : http://monaco2015.fide.com/


dimanche 4 octobre 2015

Le jour se lève sur le Grand Prix Féminin d’Échecs de Monaco


Violent orages hier soir. Ce matin, le soleil s'est levé.

Il y a deux jours a eu lieu la cérémonie d'ouverture. Quelques heures avant, nous réglions les derniers détails ... enfin, les avant derniers... avec le Président de la Fédération Monégasque et le CEO de la FIDE.
J'arrive quelques minutes avant la cérémonie et tombe sur deux joueurs en train de blitzer (parties jouée en 5 minutes) dans la salle du Grand Prix. Normalement, ce genre de pratique n'est pas autorisée, mais... le Président de la Fédération Internationale a défié mon homologue Président de la Ligue Corse


Sur la photo : au premier plan, les deux adversaires. Debout, de gauche à droite :
Madame Filatov et Monsieur Filatov, Président de la Fédération Russe des Échecs, Monsieur Rapaire, Président de la Fédération Monégasque des Échecs, et votre serviteur Président d'une Ligue dont le territoire est tout de même plus grand que Monaco.
Andrey Filatov a gagné son premier milliard de dollars en 2011. Il est venu de Moscou dans son avion privé, avec le Président de la FIDE, Kirsan Ilioumzhinov. L'année passée, j'avais assisté en Norvège à l'élection de M. Filatov au poste de Vice-Président de la Fédération Internationale, avec 98 voix sur 148. Le bruit court qu'il pourrait monter une marche supplémentaire à la prochaine élection.

Après les discours des officiels, dont son excellence, le Secrétaire d'Etat, Jacques Boisson. Le Président Kirsan a lancé le début du Grand Prix Féminin, et nous sommes passés au tirage au sort des rencontres (appariements) avec ma collègue australienne, comme son nom ne l'indique pas, Anastasia Sorokina, Arbitre Internationale de catégorie A. Nous sommes une cinquantaine dans le monde (je me la pète un peu).


Je passe discrètement de l'autre côté de la scène pour noter les numéros, et ma collègue appelle les participantes...qui prennent le sac contenant des présents, généreusement offerts par la Société des Bains de Mers.

la Championne du Monde, Mariya Muzychuk, Ukraine

la Vice-Championne du Monde, Natalija Pogonina, Russie

Vous remarquerez comme je reste concentré sur mon travail.

Pendant la réception qui a suivi, Alexandra Kosteniuk, Championne du Monde 2008-2010, a fredonné Nathalie (Gilbert Bécaud), et Je t'aime Moi Non Plus (Serge Gainsbourg), en petit comité, par sur scène.

Puis c'est la réunion technique durant laquelle on répète ce qu'on a déjà dit tout l'après-midi, et qu'on redira le lendemain avant la ronde.

Devinez qui n'a pas vu le photographe !

Le Grand Prix Féminin de Monaco est à suivre sur 

vendredi 2 octobre 2015

à la découverte d'un pays exotique

Départ de Marseille vers l'Est sauvage.
Le train est en retard, jusqu'ici tout est normal.
Beaucoup de britanniques dans mon wagon, ils vont suivre le match Monaco - Tottenham, je crois que c'est du football. Ah oui, le pays exotique, c'est Monaco :-)
Je voyage en seconde, et je suis un peu inquiet. Est-ce que les 2d s'arrêtent aussi à la gare de Monaco/ Monte-Carlo ? Ne prennent-ils pas uniquement les voyageurs de 1ère classe ? Ah ben non, je peux descendre.
Le Président de la fédération m'accueille avec un large sourire en haut d'une passerelle qui surplombe les voies. La dernière fois que j'avais été accueilli par un président de fédération, il souriait moins, mais c'était un autre président, et c'était une autre fédération.

Beaucoup de cars de police sur le parking, à cause du match de foot, les joueurs d'échecs ne nécessitent pas autant de surveillance.
Un bagagiste m'aide... ooopps ! c'est pas un bagagiste, c'est le Président de l'AIDEF (les échecs francophones). Ça en fait des présidents. Tous le monde sourit. Pour l'instant j'aime bien Monaco.

Je dépose les bagages à l'hôtel, et nous filons à la salle de jeu : Le Casino Monte-Carlo
Jean-Michel Rapaire, le Président de la Fédération Monégasque, travaille au Casino. Je ne suis jamais rentré aussi vite et aussi facilement dans un tel établissement.
Et le choc : la salle de jeu

Les murs ressemblent à ça :

la salle sans les échiquiers

Inaugurée en 1890, j'ai l'impression que la salle est neuve. Superbe.

Rencontre avec le CEO (Chief Executive Officer = le Boss pragmatique) de la FIDE (fédération internationale des échecs), monsieur Geoffrey Borg. Notre première rencontre date de 2006 à Turin.
Geoffrey et moi trouvons encore mille petits détails rien que pour embêter le gentil organisateur.
Délai pour les photos, qui peut entrer dans la zone de jeu et combien de temps, un écran pour le compte à rebours ou bien on utilise la pendule dorée de la salle ? où vont les joueuses après leur parties (salle de presse), un carton sous les feuilles de parties pour éviter d'écrire directement sur la nappe, quelles portes peuvent être ouvertes ou fermées, on change la table pour les rafraîchissements,etc.
Le président Rapaire m'explique comment se passe le tirage au sort des numéros d'appariement... je lui signale une petite contradiction avec les règlements internationaux. Retour vers G. Borg, et nouveaux petits détails à modifier. Pas grand chose à changer, millième petite modification... heureusement, J.-M. R. est habitué des salles de jeu du Casino, sa patience et son calme l'aident à gérer toute l'année les caprices des milliardaires... ce n'est pas un patron de la FIDE et un arbitre international qui vont le faire craquer... quoique...

Retour à l'hôtel. En accrochant mes costumes dans la penderie, je vois le tarif de la chambre. J'ai fait tomber mes costumes.

Retour au Casino, je suis un peu en avance. J'observe de vieilles anglaises qui jouent aux machines à sous. J'entends parler hébreux et russe. Un gentille dame me demande des informations sur les jackpots. Euh non, je ne fais pas partie du personnel.
J'attendais Geoffrey Borg, et voici Almira Skripchenko, la championne de France (par respect pour monsieur Borg, je ne vais pas dire qu'on y gagne au change). Repas agréable, Almira nous raconte son voyage mouvementé. Demain, elle a une interview, et le jour de repos, elle fait une simultanée, elle a traduit des documents. Disons le clairement, elle est exploitée... Almira a été capitaine de l'équipe de Monaco, notamment en 2012 quand ils ont remporté le Championnat d'Europe.

En 2013, Son Altesse Sérénissime le Prince Albert, remettait la médaille des Sports de Monaco à Almira

Voilà, c'est parti, demain commence le plus fort tournoi féminin jamais organisé, et j'aurai l'honneur de l'arbitrer au côté d'Anastasia Sorokina.




mercredi 30 septembre 2015

de l'huile d'olive au comté

Septembre aura été marqué par une assemblée de ligue dans le Vaucluse, suivie de formations données dans les Alpes-Maritimes et le Var.

Puis une réunion des présidents de Ligues en région parisienne.
Et enfin, un petit tour du côté de Lons le Saunier (Jura).

(article du Progrès 29/09/15)

Rencontres et échanges avec mes voisins de la Région PACA avec qui nous allons fusionner.
Rencontres et échanges avec mes collègues présidents de ligues.
Rencontres et échanges avec des bénévoles associatifs de la future région Bourgogne-Franche-Comté.
A noter le dynamisme de la ligue de Franche Comté, qui forme de nombreux jeunes dirigeants. Leur tournoi scolaire rassemble plus de 800 joueurs ! Le genre d'exemple que notre fédération devrait mettre en avant, avec l'idée, non pas d'imposer un modèle unique, mais de présenter plusieurs expériences réussies, dont chacun pourrait s'inspirer en l'adaptant à sa réalité de terrain.

dimanche 20 septembre 2015

Séminaire des Présidents de Ligues

Weekend francilien. Toujours un plaisir de retrouver mes collègues qui agissent sur le terrain.

Nous avons commencé par le projet des « grades » qui part d'une bonne intention : donner aux jeunes joueurs l'équivalent des ceintures au judo ou des étoiles de ski. 
Hélas le projet a été diffusé un peu précipitamment, il n'est pas abouti. Jean-François Sakwinski (Auvergne) relève même une erreur dans un diagramme pour débutant. Le Comité Directeur fédéral avait émis des réticences (2013), et des régions pilotes devaient tester le dispositif. Cela n'a pas été fait. On peut s'étonner de voir ce projet imposé autoritairement par le Bureau.
Il existait déjà des diplômes fédéraux. L'effort d'harmoniser au niveau national les critères d'attribution de ces diplômes est louable. Le règlement mériterait d'être simplifié. Une concertation avec la base aurait pu éviter certaines maladresses. 

Ensuite, longs discours sur des sujets sans rapport direct avec les Présidents de Ligues. Au lieu de parler de la réforme du territoire, on nous refait la liste exhaustive des compétitions fédérales... jusqu'à 17h. Beaucoup de présidents s'échangent des textos ou surfent sur internet.

Présence de l'indispensable Jordi Lopez. Le DTN adjoint profite de la pause pour procéder au tirage au sort des appariements du Top 12, le plus haut niveau des compétitions nationales par équipe. Il cherche des mains innocentes.

(de gche à dte : Président de Provence, Président du Languedoc-Roussillon, Président de Picardie)

Deux ou trois collègues tirent des noms. A mon tour, je tombe sur le nom du club dont le président fédéral est salarié (il paraît qu'il n'y a pas de conflit d'intérêt, mais ceci est une autre histoire).
Voir ici l'appariement du Top 12.

Un peu après 17h, nous commençons le 1er point à l'ordre du jour : Nouvelle Organisation du Territoire de la République.
Remarquable exposé du président de la Ligue d'Alsace. Enfin un point en rapport avec les attentes ! Jean-Paul Griggio pose avec précision les motivations politiques, notamment l'importance de ces Super-Régions dans le paysage européen. Il brosse un tableau général des obligations pour le monde sportif, et compare avec les Länder allemands. La possibilité de créer des districts, de garder les anciennes ligues sous forme de « zones sportives ». Les compétitions par équipes, qualifications jeunes, etc. tout le maillage technique des compétitions peut rester identique pendant des années.

Damien, étudiant en master II de droit du sport, nous précise quelques points de la directive ministérielle.

   (et les ultramarins qui ne changent pas)

Plusieurs ligues devraient fusionner (sauf cas très exceptionnels et motivés). Pour mon cas, la ligue de Provence va fusionner avec la ligue de Côte d'Azur. La Région ne change pas, mais nous étions coupés en deux, ce qui sera plus dur après la réforme. En plus ils sont gentils et les compétitions vont rester identiques. Il va falloir harmoniser quelques pratiques, mais rien d'insurmontable avec un peu de bonne volonté.

Les statuts de la Fédération seront changés en janvier. Aucune infos pour l'instant.

Repas en commun le soir.
Olivier Minaud, président de la ligue de Franche-Comté est assis en face de Patrick Laufferon, président de la ligue de Bourgogne. Ça tombe bien, ils vont se marier.
Hôtel, dormir, petit-déjeuner où nous parlons très sérieusement. Robert Iasoni, Président de la Ligue Île de France veut nous faire croire qu'il a couru ¾ d'heure en prévision d'un triathlon. Personne n'est dupe. Ce même président essaie de me perdre en voiture. Nous mettons 20 minutes pour faire un trajet de 5 min. Ce n'est pas comme si nous étions sur ses terres... ah ben si en fait.

Le futur directeur de la fédération, revient sur les contraintes du ministère des sports. Beaucoup d'imprécisions relevées et corrigées par des collègues vigilants. Des suggestions présentées comme des obligations, des recommandations annoncées comme ayant force de loi. Il faut détricoter tout cela pour trier le vrai du faux.
Involontairement, ce monsieur fait rire l'assemblée, en déclarant "Nous sommes tous des bénévoles", quand on sait que l'ancien trésorier a démissionné pour se faire embaucher par la FFE...
On entend parler uniquement de "salaires", d' "argent", de "concurrence", de "vente", de "part de marché". Ce n'est pas exactement ma vision du milieu associatif ni du bénévolat. Plusieurs présidents tiquent. Mon voisin, me glisse tristement : "on est bien loin des préoccupations du terrain".

Le Bureau veut nous obliger à réaliser ces fusions avant la fin de la saison. La Présidente de Midi-Pyrénées, Françoise Cwiek, indique que ses interlocuteurs régionaux lui ont conseillé d'attendre la fin de l'année 2016. Son voisin élu à la tête du Languedoc-Roussillon, Pierre Leblic, va dans le même sens, ça tombe bien, ils doivent travailler ensemble. Mais le Bureau s'entête à vouloir leur imposer une date plus proche. Pourquoi cette précipitation ? Mystère. Le président fédéral tente une ultime manœuvre : que tout cela soit tranché par le Comité Directeur de novembre. Je lui rappelle que le ministère a demandé un calendrier pour le 30 septembre. Devant tant de mauvaise foi, même ses proches, à part le vice-président, plaident pour une date butoir au 31 décembre 2016. Rappel : le ministère a fixé à fin 2017 sa date limite, nous aurons donc un an d'avance.

Ensuite, le président demande de ne pas parler de ce qui va mal. Il veut que nous dressions un tableau rose. Il parle de méchants, et au lieu d'assumer ses erreurs, cherche des bouc-émissaires.
Sans aller jusqu'à citer Churchill et promettre "du sang, de la peine, des larmes et de la sueur", j'ai l'impression qu'un président honnête, qui reconnaîtrait ouvertement qu'il y a des problèmes, s'attirerait la sympathie.

Il est midi passé, et nous n'avons pas parlé du nouveau siège. La fin est un peu bâclée.
Le président nous annonce que la 2e AG extraordinaire n'aura pas lieu, c'est le Bureau qui en a décidé ainsi. Le « projet lyonnais » n'est plus d'actualité. Il est à noter que l'opposition ne portait pas sur la localisation, mais sur les nombreuses imprécisions, l'absence de chiffrage (voir article précédent) et le sort des salariés. Le siège reste en Île de France. Nous quittons les locaux actuels à la fin de l'année, mais allons rester sur la commune.
Le président oublie de nous dire qu'il a rendez-vous demain avec la Mairie d'Asnières, pour discuter de possibilités de s'y installer. Je le lui rappelle.

Il est déjà l'heure de partir. Echecsinfos nous présente un projet pour fournir des échiquiers au Népal (voir son site).

Après le séminaire je rentre avec la navette jusqu'à la gare de Lyon. Nous sommes quatre présidents de ligues qui continuent d'échanger sur leur passion commune, ce qui est l'essentiel.
A la gare, un sandwich, et après 3h de train, j'arrive à Marseille où de nombreux supporteurs de l'OM envahissent déjà les rues.
La rencontre Olympique de Marseille - Olympique Lyonnais se solde par un match nul.

mardi 25 août 2015

Déménagement : la base demande un peu de transparence


Dix-neuf présidents de Ligues Régionales ont signé une lettre commune. Le sort des salariés, le chiffrage du projet et l'étude de contre-propositions sont évoqués.
L'Île de France a pris un temps de réflexion supplémentaire, l'ensemble de son comité directeur signe un communiqué. 

Tous sont d'accord pour marquer leur inquiétude face au projet de déménagement, et soulignent le manque d'information. Tous se posent des questions et demandent au Comité Directeur fédéral d'apporter des réponses concrètes.
Le projet proposé est peut-être bon, mais nous manquons d'éléments pour nous déterminer.

Souhaitons que ces démarches constructives permettront de faire évoluer ce projet. La demande de transparence est forte, espérons qu'elle sera entendue par les dirigeants fédéraux qui feront ainsi preuve d'ouverture.

Cliquez sur "Plus d'infos" pour lire les deux documents

mercredi 19 août 2015

Une Assemblée Extraordinaire

Lors de l'Assemblée Générale Extraordinaire du 15 août 2015, plusieurs éléments sont apparus au grand jour :
Des solutions alternatives de relocalisation du siège existent en Île de France et dans l'Est : pourquoi n'ont-elles été présentées ni en Comité Directeur, ni en Assemblée Générale ?
Le projet de délocalisation à Lyon ne dispose d'aucune garantie.
Le sort des salariés n'a pas été pris en compte dans le projet.

La situation financière
Le partenariat de 200.000 €, initié en 2008 (*voir note en bas de page) et prolongé en 2012, avant l'arrivée de la nouvelle équipe, n'a pas été renouvelé. C'est un fait. Que l'ancienne équipe ait mal consolidé, ou que l'équipe actuelle ait mal négocié ne change rien au problème : la situation financière est difficile, l'heure n'est pas à la recherche de coupables, il faut réagir.
  • trouver de nouvelles ressources
  • faire des économies
N' ayant pas trouvé de ressources extérieures il fut décidé de mettre les licenciés à contribution : inscriptions aux Championnat de France Jeunes en augmentation de 150% ; participation aux Championnats internationaux Jeunes à la charge des parents, clubs, ligues et comités départementaux ; augmentation des droits d'homologation, etc.

Côté économies, le siège fédéral coûte cher : 48.000 € de loyer annuel (et non 60.000 € comme le disent certains). Nous n'en avons plus les moyens.
L'ancienne équipe a-t-elle sous-exploité la Commanderie des Templiers ? L'équipe actuelle a-t-elle utilisé tout le potentiel de ce site historique ? Là encore, la priorité n'est pas à la recherche de bouc-émissaires, mais de trouver des solutions efficaces qui aillent dans l’intérêt de tous.

Urgence de trouver un nouveau siège ?
Le bail négocié avec la Communauté d’Agglomération de Saint-Quentin en Yvelines ne prend fin qu'en juin 2018. Le partenariat BNPP court jusqu'en décembre 2016.
Nous ne sommes donc pas en zeitnot mais en partie longue, voire en partie par correspondance. Même s'il y a un consensus pour quitter les locaux actuels, nous avons le temps de prendre nos décisions calmement.

Le projet Lyonnais
Si on nous démontre que ce projet permet d'économiser de l'argent d'ici la fin du mandat, il ne faut pas hésiter. Si on nous montre que le projet est rentable à court ou moyen terme, on peut tenter l'aventure. Lyon est une ville qui a souvent aidé les échecs par le passé, c'est un pôle économique important, et sa situation géographique en Europe en fait une place attractive. Mais la question n'est pas : Lyon est-elle une jolie ville ? La question est : quel est le projet ?

Plusieurs questions ont été posées ce 15 août. Les réponses montrent que nous agissons dans la précipitation. Le manque de préparation et de professionnalisme ont été soulignés par de nombreux intervenants. Jugez plutôt :
On ne connaît pas l'adresse exacte du siège, et pour cause : il n'existe qu'une lettre d'intention des politiques lyonnais. Nous n'avons donc, à ce jour, aucune garantie d'avoir des locaux pour un siège fédéral à Lyon !
Les locaux promis (sans garantie) sont en travaux, ils doivent être désamiantés. Ces travaux prendront des mois, et s'ils nous étaient finalement attribués, ce ne serait pas avant la rentrée 2016. La proposition actuelle revient à squatter le club de LOE, en espérant qu'un jour la Ville propose un hébergement. Cela ne semble pas assez abouti pour être voté.
Le coût du déménagement n'a pas été chiffré.
Combien coûtera l'occupation des locaux ? Là encore, pas de réponse.
Ce qui nous était présenté comme un projet bien ficelé n'est en fait qu'une esquisse assez vague.

Les projets alternatifs
Lors de l'AG, le président fédéral a évoqué pour la première fois des options comme Nancy ou Chalons. Alors que Lyon semblait être une variante forcée, il apparaît que d'autres villes peuvent nous accueillir.
Une solution existe même dans la communauté d'agglomération actuelle, à moindre coût, et qui permet donc de conserver les employés fédéraux. Quand l'assemblée a appris cette contre-proposition, elle a voulu en savoir davantage. Pourquoi refuser que les salariés présentent cette proposition en CD puis lors de l'AGE ? Mystère.
Je suis intervenu pour parler de la ville d'Asnières. Cette ville de 90.000 habitants, située à 5 min. de Paris (20 min. du quartier d'affaires de la Défense) est dirigée par un ancien licencié de la FFE. Son Maire, vrai passionné, a mis en place des ateliers dans les écoles et a même embauché le grand maître Anatoly Vaïsser. Il a fait savoir en mars, qu'il était prêt à discuter avec le président fédéral, pour accueillir le siège. Le président a reconnu qu'il avait reçu cette invitation. Ma question : avez-vous pris contact avec cette ville depuis mars ? Sa réponse : Non.
Toutes les options ne doivent-elles pas être examinées, et les projets mis en concurrence ?

Le volet social
Comme l'a souligné un délégué de club, changer de siège implique une modification du contrat de travail. Nous avons appris que les salariés du siège n'allaient pas l'accepter. Ils seront donc « remerciés ». Personne n'est proche de l'âge de la retraite, et le télétravail ne semble pas envisageable. Il faudra donc verser des indemnités conséquentes (une salariée a 23 ans d'ancienneté, trois autres sont là depuis huit ans).
A la question simple : à combien avez-vous estimé les indemnités de licenciement ? Il a été répondu que la loi serait respectée... mais aucun chiffre n'a été donné.
Là encore, comment voter un dossier qui n'est pas chiffré ?
Avec le départ du Directeur Général, s'il fallait ajouter le licenciement des salariés du siège, la perte de compétence serait sans doute immense pour la fédération.
Combien d'années faudrait-il pour former de nouveaux employés opérationnels. Et combien d'années pour économiser sur le loyer du siège afin de compenser les indemnités de départ ?
Analyser cette variante est d'autant plus absurde qu'il existe au moins deux options qui permettent de conserver les salariés en région parisienne, tout en réduisant les loyers.
Plusieurs intervenants ont été choqués par la gestion « humaine » de ce dossier. Nos dirigeants devraient être conscients de la place inestimable qu’ont, au même titre que les bénévoles et les joueurs, ceux qui œuvrent professionnellement pour les échecs, dans les clubs, les ligues, les comités, et dans le cas qui nous concerne aujourd’hui, au sein de notre Fédération.


Conclusion
Aujourd'hui, nous ne disposons ni de données chiffrées, ni de garanties, pour voter le projet proposé. Il convient en outre d'étudier toutes les autres propositions, avant de demander à l'Assemblée Générale de trancher.
Le Comité Directeur devrait se saisir du problème, et voter le report sine die du « projet »
Il est possible de déménager dans la même communauté d'agglomération, avec une baisse très importante du loyer. Cela permettra d'analyser calmement la position, et de prendre en compte toutes les ressources stratégiques et tactiques pour élaborer notre plan.

Stéphane Escafre
Président de la Ligue de Provence Echecs
Membre du Comité Directeur FFE

* note du 20/08/2015 :
remarque de JC Moingt, ancien président FFE : "le partenariat avec BNP Paribas (...) a été signé le 1er septembre 2006 (et non 2008), renouvelé deux fois en 2009 et 2012 (pour 4 ans en 2012 au lieu de 3 ans ce qui démontre un renforcement du partenariat avant l'arrivée de l'actuel président de la FFE)."
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Pour lire le compte rendu de cette AGE établi par le Président de la Ligue de Bretagne, Christian Bleuzen, cliquez ci-dessous sur "Plus d'infos"


samedi 8 août 2015

Assemblée Générale Extraordinaire

Voici un commentaire publié sur le Forum de France-Echecs ici
cliquez ci-dessous sur "plus d'infos" pour lire ce commentaire

dimanche 2 août 2015

Il est urgent d'attendre

Une AG extraordinaire pour changer de siège fédéral.
Un projet improvisé au mépris des salariés.

Je serai présent le 15 août à cette AG. N'hésitez pas à me contacter si vous souhaitez des informations (par mail ou sur FB, éventuellement par téléphone).

lundi 22 juin 2015

CD FFE juin 2015

Plusieurs points de frictions lors de ce comité directeur :

Championnat de France jeunes : l'inscription passe de 20 € à 50 € (+ 150 %)
tarif dégressif pour les familles : 30 € pour le deuxième enfant, 20 € pour le troisième.

Championnat de France individuel ("adulte") :  
Passage de 5 à 2 opens. + de 2000 Elo (qui regroupe Accession et Open A), et un - de 2000 regroupant es Opens B, C et D. 
Réduction du nombre de parties : 9 rondes en 9 jours (du samedi au dimanche suivant) :  
On garde les Vétérans (refus du CD de les intégrer au - de 2000).
Pour les Nationaux : passage de 12 à 10 joueurs. 5 qualifiés par leur place au national précédent, 3 au Elo, et 2 venant de l'accession.
Le président Salazar voulait que les changements soient effectifs dès cet été : refus du CD qui repousse ces modifications à 2016.

Sponsors :
Après avoir dépensé 27.000 € puis 15.000 € en pure perte, dans une boite chargée de "sécuriser" les partenariats, le président a perdu le partenariat BNP Paribas.
Rappelons que ce partenariat, qui court jusqu'en 2016, avait été finalisé par l'ancien président fédéral, monsieur Henri Carvallo, bien avant l'élection de l'actuel président.
L'actuel président avait promis un million d'euros pour les clubs un peu avant son élection.
Note : la partenariat BNPP portait sur environ 200.000 €

Rémunération :
Le président propose qu'on rémunère le trésorier (il y a quelques semaines, le trésorier avait proposé qu'on augmente le président). Refus du CD. Pour contourner cette décision fédérale, le trésorier démissionne de son poste et va se faire embaucher par le président (pas besoin de l'accord du CD pour ça).

Démission du Directeur Général de la Fédération.
Note : le Directeur a négocié un licenciement contractuel.

Siège fédéral :
L'équipe actuelle ayant poliment été priée de quitter les locaux de St Quentin en Yvelines ... proposent de partir à Lyon. Les autres propositions n'ont pas été présentées au CD qui avait donc le choix entre Lyon ou Lyon.
Les salariés ont été priés de ne pas donner leur avis, et de ne pas venir dimanche matin lors du CD.

A suivre

CD FFE : tout va très bien

En attendant un compte rendu plus détaillé, voici une bonne idée du discours officiel


jeudi 7 mai 2015

WTCC Tsakhkadzor : suite et pas faim

Le Championnat du Monde s'est terminé ... dur d'écrire quand on voyage.

Pas de suspens, les Chinois sont Champions du Monde, un beau doublé puisqu'ils avaient remporté les Olympiades en août.

Saurez-vous reconnaître lequel n'est pas Champion du Monde ?

Quelques mois plus tôt en Norvège : Ukraine - Chine 
(votre serviteur au fond en bleu)

Les Etats-Unis jouent contre Cuba... un avant goût de la rencontre Obama-Castro. L'arbitre est iranien.
A noter que les deux adversaires au 4e échiquier portent la veste de sport offerte par l'organisateur. USA et Cuba arborent la même tenue.
Je passe à côté du match Chine-Inde... 3 milliards de spectateurs... environ.
Les ukrainiens font des nulles assez rapides, ils assurent la 2e place. Un peu plus tôt, dans les couloirs de l'hôtel, j'ai croisé Ivanchuk, il pousse quelques cris. Visiblement, il n'a pas dormi de la nuit.

Les chinois annulent sur deux échiquiers. Ils sont champions du Monde ! Les deux derniers échiquiers peuvent donc annuler tranquillement... tu parles, fini l'époque soviétique... enfin, je veux dire... vous m'avez compris. 6h de jeu plus tard une nulle et un gain... 6h ! alors qu'une nulle suffisait... vous comprenez pourquoi ils sont forts ?

Avant la remise des prix, petite photo avec les 10e (qui a dit les derniers ?)


Un des joueurs égyptiens (le barbu, à droite sur la photo) me demande si je suis de la famille de Jaan Ehlvest, Grand Maître américain d'origine estonienne ... je vous laisse juger.

à gauche S.E., à droite J.E.


Une fois la ronde terminée, sans incident, le Chef Arbitre, Ashot Vardapetyan, le meilleur arbitre du monde (il lit ce blog ...) et moi allons dans le bureau des arbitres. Je remarque alors seulement l'inscription sur la clé de la salle :


Nous avons un petit doute : faut-il remettre une médaille pour le 5e échiquier (remplaçant) ? Le texte est un peu ambiguë... mais finalement ... non.
Ashot me demande de vérifier sa vérification des calculs de l'ordinateur. Deux ou trois points m'embêtaient un peu. Aussi quand il m'interroge, je pars dans une explication détaillée de mon travail. Il me coupe "Ce n'est pas ma question : tu es d'accord ou pas ?" Moi : "oui". Lui : "Alors c'est bon, on fait la remise des prix".

Remise des prix très solennelle. L'Arménie termine 3e.
L'épouse de Peter Leko fait la traduction en anglais.


Une pianiste joue du piano, une soprano soprane et un ténor ... chante aussi.


Les trophées sont magnifiques, j'ai essayé d'en piquer un... mais finalement non.


On appelle Ivanchuk pour une médaille au 2e échiquier, il reste longtemps dans son fauteuil, normalement les joueurs avaient des places réservées devant la scène. Il finira par venir chercher sa médaille, et cela n'étonne personne.

Toujours un grand moment de soulagement, pour les arbitres, quand se termine la remise des prix.
J'ai du mal à imaginer que je quitte l'hôtel à 3h du matin.
Mais l'assistante de l'organisateur nous pousse dans la salle du restaurant ...


à ma gauche (donc à droite sur la photo), Igor, l'arbitre russe boit de la vodka suédoise.
Le français goûte le "cognac" arménien... ils n'ont pas le droit d'utiliser le terme "cognac" ... Un arménien - dont je tairai le nom - me cite un proverbe : "Quand on boit du cognac français, on veut une femme. Quand on boit du cognac arménien, on veut du cognac français !"

Je me couche et me relève aussitôt. La navette pour l’aéroport est déjà là.
Deux femmes de chambre entrent dans la chambre (est-ce une nouvelle règle de venir à deux, par sécurité, dans la chambre d'un français ?... pourtant ce n'est pas un Sofitel). L'une d'elles me dit alors "Mes nibards !" ... je me promets d'arrêter le cognac arménien... puis elle ouvre le frigo pour inspecter le "mini bar".
Je n'ai rien consommé. Je descends à la réception. Des ukrainiens, des indiens.

Je partage le taxi avec le 1er échiquier indien... enfin avec le joueur qui jouait au premier échiquier (on n'avait pas posé un morceau de bois). Nous avons une discussion très intéressante sur le rôle du capitaine... dont j'ai presque tout oublié.
Un point cependant : il me dit qu'une aide capitale (donc une tricherie) serait de savoir s'il est mieux ou moins bien pendant la partie. Tout simplement. 
Si le capitaine lui indique qu'il est mieux ou moins bien, ce n'est pas la peine de lui donner la suite de coups, il saura la trouver. 
Au milieu d'une longue phrase, je m'entends prononcer le début de la phrase en anglais, et en même temps, j'entends une voix française dans ma tête me dire "oh pôvre, je sais pas comment tu vas la terminer celle-là, mais tu aurais mieux fait de mettre un point au lieu d'enchaîner les virgules !"
Le grand maître me propose aussi un moyen de communiquer avec son capitaine : il suffit d'apporter un café plus ou moins sucré en fonction de l'évaluation de la position, même pas la peine de changer de breuvage (cela pourrait attirer l'attention), juste le dosage de sucre...
Je raconte alors à mon compagnon de route, l'histoire du yaourt à la myrtille, dans le match Karpov-Kortchnoï (championnat du monde 1978). Les plus anciens la raconteront aux plus jeunes... personnellement, j'avais 7 ans ;-)

à suivre
Va-t-il pleuvoir lors de la visite de François Hollande pour les cérémonies du centenaire du génocide arménien ?
Pourquoi le vin est-il sucré ?
L'avion a-t-il des ailes ?
Les jeunes sont-ils bien dans leur Pau ? (jeu de mots de F.B.)
Ai-je mangé des gaufres ?

vous le saurez en suivant la suite de nos aventures !

jeudi 30 avril 2015

vous avez demandé la police, ne blitzez pas

Chargés de surveiller les entrées, avec leur détecteurs de métaux, après les rondes et avant de faire la leur (de ronde), les policiers se détendent dans la salle (le hall) d'analyse.


Petit-déjeuner. Je rentre le premier dans la salle. En France, Gérard Hernandez serait déjà là (pas le Raymond de M6, l'arbitre catalan).
Un serveur qui somnolait sur un canapé se redresse d'un bon, rajuste son gilet, et lance "zdravstvuyte", un peu gêné. On vous parle russe quand on n'a pas l'air arménien, ce qui fait que je ne comprends rien à ce que raconte le personnel du palace.
Arrive le président de la Commission d'Appel. Nous petit-déjeunons ensemble. N'ayant aucune langue en commun, nous ne nous sommes pas disputés.

Je veux cirer mes chaussures. La machine étant à côté de la porte d'entrée, un groom m'ouvre la porte avec un sourire "pozhaluysta" (je vous en prie). Je lui réponds "Niet", en montrant mes chaussures. Parce que je veux qu'elles sont bien niettes.
Cela m'arrive trois jours de suites. Après je ne vais plus cirer mes chaussures, par pitié pour le groom qui se gèle à chaque fois qu'il ouvre la porte.

Seuls le Chef Arbitre et moi portons des cravates. De temps en temps, un arbitre de match iranien se permet d'en porter une. C'est un ambitieux.

à gauche l'ambitieux a oublié son badge


Les deux adversaires du 4e échiquier du match Cuba-Israël ont des chaussures Lacoste.

Fatigué. 5e café. Un technicien me pose une question à laquelle je ne comprends rien. Je prends un air intelligent (ce qui me demande un assez gros effort), et propose un "hum hum ?" interrogatif. Il précise alors "Nintendo". Et je l'autorise à récupérer l'ordinateur que nous utilisons pour afficher le compte à rebours avant le début des parties.

Pendant les parties, j'entends murmurer. Je me retourne, et souvent Boris Gelfand, et là, seul, à chuchoter des variantes pour lui-même. Parfois, Richard Rapport fait de même. Mais ça n'a aucun rapport (vous auriez été déçu si je ne l'avais pas dit ...)

Des prises électriques sont dissimulées sous la moquette. Quand on fait glisser un petit loquet, cela libère la prise qui sort du sol. Des joueurs marchant négligemment sur ce loquet peuvent ainsi faire apparaître ce piège qui risque de faire trébucher le joueur qui les suit. La plupart du temps, les joueurs ne le font pas exprès.



Les chinois portent des doudounes bleues et blanches. Quand ils croisent les bras, ça fait "swiscchh swiscchh !"

Un joueur indien porte des baskets neuves. Quand il bouge les pieds, ça fait "qwwirk qwwirk qwwirk"







La remise des prix aura-t-elle lieu ?
Pourquoi Ivanchuk crie-t-il dans les couloirs ?
A-t-on la preuve que les chinois ne sont pas soviétiques ?
Quand on commence une phrase compliquée en anglais, que se ... ?

vous le saurez en suivant nos prochaines aventures...

lundi 27 avril 2015

bizarre bizarre Arménie WTCC

à gauche, j'ai pas vu le photographe, à droite, j'ai vu le photographe

ça commence au petit déjeuner : le chef de la délégation chinoise me demande où est la girafe... pardon ? Il fait un effort, et franchement, je suis admiratif (j'aimerai avoir son niveau d'anglais en chinois)... pourquoi y'a t-il la girolle ? Non, au petit-déjeuner, on ne sert ni girafe, ni girolle.
Ah ! Shirov !
Alexei Shirov fait partie de la Commission d'Appel. Le délégué approuve, il a compris. Et j'ajoute... il est aussi commentateur pour internet. Là il dit yes, mais je vois qu'il n'a pas compris. Je fais alors le geste de taper sur un clavier et je dis "bon coup, mauvais coup". C'est bon, il sait pourquoi la girafe mange des girolles.

Le chef arbitre me dit que c'est un jour important pour la France aujourd'hui... J'ai beau chercher... "PSG Barcelone !" précise-t-il. Je me dis que ça doit être du foot. Mais à part que ça se joue à 9, je n'y connais rien. Je lui parle tout de même de Djorkaev dont je me rappelle qu'il est à moitié Arménien, à moitié Kalmouk.
Venant du sud-ouest de la France, je suis plus intéressé par le rugby. Nous discutons un peu d'autres sports, et tombons d'accord sur le fait que le football américain n'est pas viril.

Captain America (le capitaine de l'équipe des USA) arrive en short et polo, pour donner sa composition. Dehors il neige.

Le capitaine ukrainien, Sulypa me demande pourquoi c'est Israël qui remplace l'Azerbaïdjan et non la France qui était 2e en Europe. Je botte en touche.
Un peu plus tard durant la ronde, Sulypa qui est Grand Maître.il m'avouera, plein d'humilité. "Capitaine, ok... mais qu'est-ce que j'y comprend à la partie de Ponomariov ?"

Au premier plan Ponomariov (ancien Champion du Monde FIDE)
Au deuxième plan son capitaine.

Midi, un joueur me demande pourquoi la France ne joue pas. Je réponds que c'est un problème de budget, peut-être.
Ivantchuk arrive avec un bonnet sur la tête, normal, il neige. Derrière lui le n°1 américain, Shankland, pieds nus.

J'arrive le premier dans la salle de jeux, 3/4 d'heure avant la ronde... ne croyez pas que c'est pour faire du zèle, c'est juste pour ne rien faire plus longtemps, et surtout pour savourer mon café. La machine mise à notre disposition propose expresso, cappuccino, café allongé, au lait... une douzaine de choix. J'appuie sur expresso sans sucre... rien ! La machine ne fonctionne pas. Panique ! Horreur ! Épouvante ! Un tournoi d'échecs normal sans café c'est déjà difficile à imaginer, mais un championnat du monde !
Je file au bureau de l'organisation : El cafétian niet fonctioni ! L'assistante de l'organisateur ne semble pas comprendre la gravité de la situation, elle n'est pas joueuse d'échecs. Pas de café ! Pas de caféine ! Tu capisco pas ?? je dessers ma cravate, j'ai des sueurs froides. Où est l'organisateur, le Grand Maître Lputian. Lui il comprendra. Je commence à crier CAFÉINE !
L'organisateur arrive, en un instant, il juge de la gravité de la situation. Un coup de fil au ministre des machines à café (ça sert d'avoir comme président de la fédération, le président de la république).
En attendant, le bar de l'hôtel va pallier (bien qu'il soit au rez-de-chaussée) ce manque.
On assiste à un défilé de serveurs et de capitaines portant des plateaux remplis de tasses à café et de théières.

Ponomariov a une ceinture neuve.

Un peu plus tard pendant la ronde, je fais le tour des arbitres pour voir si tout va bien. Je fais une ronde pendant la ronde. Arrivé à Margalita, je ne sais pas trop quoi lui dire, car elle parle peu anglais, et moi pas du tout géorgien. Je lui dis que la machine à café est bientôt réparée. Elle comprend que je lui propose un café, et me répond "non merci"... voilà, sur un malentendu, je passe pour un garçon prévenant et attentionné.

Je repère un téléphone sur la table d'un arbitre ????
Les téléphones sont absolument interdits. Les policier contrôlent avec un détecteur de métaux. Si un joueur entre avec un téléphone il perd la partie... Alors c'est quoi ce бардак !
Avant d'appeler la police, l'armée, les pompiers, de faire boucler le périmètre pour l'équipe de déminage, je demande à Margalita si c'est à elle ? Niet. Igor ? c'est à toi. Niet. Tu sais à qui c'est ? Da au capitaine chinois.


Mais Igor, tu l'as autorisé. Niet mais pas de problème. Comment-ça pas de problème ?? Mais c'est un téléphone, c'est le mal, l'arme absolue du tricheur. Celui qui utilise un téléphone va en enfer. Igor n'est pas choqué. Bon, je vais tout de même vérifier avec le chef arbitre s'il a autorisé son utilisation.
Je reviens avec Ashot Vardapatyan et un exorciste. Ashot discute avec le capitaine chinois. Il va l'autoriser à prendre des photos avec pendant deux minutes, au début des rondes, et ensuite il ira le remettre dans sa chambre. La police est prévenue. L'exorciste jette un peu d'eau bénite sur l'appareil.

La machine à café fonctionne à nouveau. Parfois, les capitaines ou les policiers sont un peu bruyants autour de ce point d'eau. Mais là, nous entendons un arbitre parler très fort. Ashot et moi nous regardons désespérés. Le Chef Arbitre va chercher le fautif qui regagne sa place, penaud.

Le premier contrôle de temps de passe. Les parties avancent. Un joueur chinois vient me voir un peu paniqué. Il a besoin d'une deuxième feuille pour noter ses coups. Je lui montre que les feuilles supplémentaires sont déjà à côté de son échiquier. L'arbitre de match les avaient déjà posées si discrètement que le joueur ne s'en était pas rendu compte.

Entre eux, les israéliens parlent russe.

Un dirigeant de l'European Chess Union me questionne pourquoi la France n'a pas demandé à remplacer l'Azerbaïdjan qui a déclaré forfait. Ce pays s'était qualifié pour le championnat du monde en passant par l'Europe, et la France étant 2e, elle était légitime pour remplacer l'Azerbaïdjan.
Israël (qui est en Europe pour les échecs) a fait un gros travail de lobbying. La Fédération Française rien. C'est dommage car nous avions de bonne chance de podium.
Je n'y peux rien si le président ne s'en est pas occupé. Le Champion de France, Laurent Fressinet, avait soulevé ce point lors d'un comité directeur fédéral, mais c'était déjà trop tard.

Pourquoi certains arbitres portent-ils des cravates ?
Pourquoi certains joueurs font-il switchswitch et d'autre srcouchsrouch ?
Après l'heure c'est l'heure ?
Faut-il sortir sous la neige pour cirer ses chaussures ?

vous le saurez en suivant nos prochaines aventures ...

samedi 25 avril 2015

WTCC Ronde 2 et tout ça

La Ronde 2 succède à la première ronde, c'est dire si les choses sont bien organisées.

Je note : virer le photographe

Petit déjeuner. Dans l'équipe d'Egypte joue Samy Shoker. J'ai croisé plusieurs fois. Par exemple dans l’Océan Indien, sur l'île de la Réunion (photo ci-dessous au pied du volcan)
Puis dans le Gers, puis en Norvège, et enfin en Arménie. L'égyptien a travaillé en Amazonie. Il rentre du Texas où il a complété ses études, et il part travailler en Ouzbékistan pour l'université française. Ce n'est pas un GMI, c'est un GMTI (grand maître très international)


Samy est tellement en décalage horaire qu'il arrive à l'heure pour le petit-déjeuner.
Comme nous discutons souvent ensemble, les organisateurs pensent que je parle arabe, alors que Samy parle mieux français que moi.

Le matin, à la composition des équipes, je dis à l'arbitre qui m'accompagne que je parle ukrainien couramment. Tiens, quel hasard ! Oleksandr Sulypa, grand-maître ukrainien, attendait pour me donner sa composition. Nous commençons à échanger quelques mots, je le félicite pour la victoire de son équipe face à la Russie. Il enchaîne avec les championnats de boxe, où les ukrainiens ont aussi gagné devant les russes. Je fais un peu durer la conversation, pour impressionner mon collègue...
La veille, Oleksander m'avait dit qu'il parlait français "j'ai joué à Guingamp". Je ne connais pas un mot d'ukrainien... mais mon collègue arbitre non plus.

Le capitaine cubain arrive, je vais pouvoir pratiquer un peu (vraiment) mon espagnol.
Je lui demande si tout va bien, il me dit que oui. Je l'informe que la semaine passé, j'étais dans les Caraïbes, au sud de chez lui. Il a l'air intéressé, je poursuis en précisant que j'ai passé une semaine en Martinique et une semaine en Guadeloupe.
Il me répond : "Ah oui, bien sûr mais c'est une fête que nous ne célébrons pas à Cuba."
Un peu plus tard, venu voir la composition de ses adversaires, je l'entends distinctement dire à ses compatriotes que j'ai un très bon accent... mais qu'a-t-il compris quand je lui ai parlé ?

Midi, je mange un peu d'herbe.

Le Chief Arbiter me raconte ses promenades dans Paris. La beauté, la grandeur de la ville.
Les repas étaient excellents me dit-il, mais quelle habitude étrange de servir le fromage après le plat principal.

La Hongrie a encore un joueur de trop. Je regarde la liste, et signale à l'arbitre de match qu'Almasi est un intrus. Il lui demande poliment de quitter la zone de jeu. Mais Almasi reste à proximité. Je le signale au Chef, car j'ai le sens de la hiérarchie. "I will take care" (je gère). Et pourtant, je vois bien qu'il ne fait rien. Il laisse Almasi regarder un peu les matchs, sans intervenir... Je m'interroge, serait-ce le syndrome du respect excessif des joueurs titrés ? Non, pas Ashot, ça c'est pour les arbitres débutants... Quelques minutes plus tard, alors qu'Ashot a gardé la situation sous contrôle en permanence, il commence à discuter avec le hongrois (hongrois, mais on est pas sûr), et se dirige avec lui vers la sortie.
De la douceur, du tact, le bon timing, de la diplomatie... c'est pour ça que c'est lui le chef.

Un peu plus tard, quand le chef revient, je lui signale qu'il manque la boite pour recueillir les feuilles de parties utilisées par les chessbaseurs (pour vérifier uniquement, les parties sont enregistrées automatiquement).
Ashot gère les grands maîtres, je gère les boites.

L'arbitre arménien a rappelé aux arbitres que j'étais en charge en son absence, et comme il est souvent occupé ailleurs, je suis souvent en charge... quand il ne se passe rien.
Cela me rappelle cette réplique de Paul Bocuse :
Journaliste : Qui fait la cuisine quand vous n'êtes pas là ?
Bocuse : Les mêmes que quand je suis là !

Sasikiran me demande quelle est la cadence.

La ceinture de Ponomariov est à moitié coupée dans le sens de la hauteur.

Un arbitre de match passe à côté d'une table où il reste moins de 30 secondes à un joueur. Il passe... sans s'arrêter. Euh... what about surveiller un peu this game ?

Quand Aronian termine sa partie, il passe devant les policiers pour regagner sa chambre. Les policiers l'arrêtent. ... Je veux dire le stoppent... pour se faire prendre en photo avec lui. L'un des dix meilleurs joueurs du monde, d'un sport dont le président de la république préside aussi la fédération nationale...

Nous attribuons les tables pour chaque arbitre pour la ronde suivante. Nous avons attribué les mêmes matchs à chaque arbitre, mais Ashot a interverti deux matchs... Ben pourquoi qu'il a fait ça ? "Les russes viennent de perdre sur ces tables, il est préférable de ne pas les faire rejouer au même endroit"

Que va-t-il se passer ?
Le pantalon de Ponomariov va-t-il tomber pendant la prochaine partie ?
Pourquoi le chef de délégation chinois me parle-t-il de girafe ?
La machine à café va-t-elle résister ?
Le président de l'ACP va-t-il m'offrir un thé ?
C'est quoi comme poisson ?

Vous le saurez en suivant nos prochaines aventures.

vendredi 24 avril 2015

Championnat du Monde par équipe. Ronde 1, la vraie

à la ronde un, on pousse du bois

Le matin, lors de la remise des compositions d'équipe, le capitaine égyptien a oublié la date. Il discute en arabe avec mon collège des Emirats Arabes Unis, mais je comprends que lui aussi a oublié la date. Je dis alors négligemment تسعة عشر ce qui veut dire "dix-neuf". C'est le seul nombre que je connaisse en arabe, hasard du calendrier.

la ronde va commencer

D'abord gérer Ivanchuk, le Grand Maître ukrainien est capable de battre n'importe qui, et de perdre contre n'importe qui. Il est aussi capable de s'asseoir au mauvais échiquier, ou de se retrouver face à un panneau de bois sans savoir où aller.

Alors, à quoi sert un Deputy Chief Arbiter (Chef Arbitre Adjoint) ? D'abord remplacer le Chef quand il est absent de la salle, et prendre les décisions importantes. Les arbitres de matchs interviennent pour les affaires courantes (en marchant), mais s'il faut sanctionner sévèrement, c'est le chef qui prend la décision finale. Le Chief Arbiter (CA) et le Deputy Chief Arbiter (on m'appelle DCA parce que je plane un peu) sont aussi plus libres, alors que les Match Arbiters (MA) sont attachés à un ... match. Nous pouvons donc fondre sur l'ennemi, attaquer un spectateur bruyant, ou alors chercher l'organisateur pour qu'il répare la machine à café.

Comme on le voit sur la photo ci-dessus, le Chief Arbiter, Ashot Vardapetyan, a un adjoint pas très net.

A la première ronde, le CA est souvent absent de la salle, car il a mille détails à régler avec l'organisateur et les délégations, en plus des formalités administratives. Je suis donc la plupart du temps seul dans la salle en charge de coordonner les actions des arbitres, vérifier que tout le monde applique le protocole de la même façon : vérification de la notation, contrôle du temps, surveillance des capitaines, des communications, prise de résultats, etc. (je mets "etc." pour faire genre il y a beaucoup à faire, mais je n'avais plus d'idée, vous l'aurez compris).
Il faut aussi rappeler à l'ordre les "jeunes" arbitres qui glissent parfois vers un rôle de spectateur, et vont regarder les parties au lieu d'observer les matchs.
Pendant que je distribue divers documents aux arbitres et aux chefs de délégations, Ashot passe de temps en temps contrôler que je contrôle les arbitres qui contrôlent les joueurs qui contrôlent les pièces.

Nous disposons d'eau plate ou gazeuse ainsi que d'une machine à café qui offre une douzaine de choix, mais seulement une sorte de thé pas très buvable. Le CA s'assure que d'autres thés seront disponibles.
Il gère aussi d'autres détails mineurs, comme la venue du président de la république. Il viendra 2h après le début de la ronde, avec tout ce que l'arrivée de gardes du corps et d'équipe TV peut avoir d'incompatible avec l'obligation de quiétude qu'impose un championnat du monde.

Margalita Tandashvili 

L'arbitre internationale géorgienne, Margalita Tandashvili, repère un soucis dans le match Cuba-Hongrie. Ce n'est pas son match, elle en réfère donc au DCA, moi-même.
Je vérifie : 4 joueurs assis, et un joueur debout... ah oui, ça fait un joueur de trop dans une équipe de 4. Je signale donc l'anomalie à l'arbitre du match : les joueurs en réserve ne sont pas autorisés dans la salle de jeu. Je lui dis d'intervenir poliment, gentiment, c'est la première ronde, on rappelle tranquillement le règlement. Du coin de l’œil, j'observe l'intervention du jeune collègue qui est souriant. Puis il va tranquillement s'asseoir... ah... bon, j'aurai dû être plus précis... je vais donc vers lui, et lui demande d'aller voir le capitaine hongrois pour lui rappeler aussi le règlement. Normalement c'est le rôle du capitaine de tenir les joueurs non-impliqués dans le match loin des échiquiers.

On frappe à la porte... oui... euh je veux dire "yes", enfin, "da" ? ah des femmes de chambres (c'est politiquement correcte, ça "femmes de chambres" ? C'est mieux que "bonnes", mais peut-être "assistante hôtelière en charge de l'hygiène et de l'approvisionnement serviettal" ?) Bon, elles sont là, mais je n'ai besoin de rien. Comment dire ça à deux jeunes arméniennes qui n'ont surement pas choisi le provençal en LV2 ? D'un geste de la main, je fais : "C'est bon, merci, vous faites très bien votre travail, mais je suis occupé, j'ai tout ce qu'il faut" (j'ai les mains très expressives). Je rajoute "ok ok", mais leur visage exprime très bien ... "hein ?"... je tente le peu de russe que je connais "ничего" (rien) je crois qu'elles comprennent. Mais l'une d'elle me propose une serviette, mais non, j'en ai encore trois non-utilisées. 
Allez pour leur faire plaisir, je tente "voda !", et la plus jeune me demande "vodi ?" eh oh ! on va pas chipoti ! voda, vodi, ça suffa comme çi. Elle est bien contente que j'ai besoin d'eau, la jeune arménienne sourit... voilà allez "didi madloba" dis-je en fermant la porte... ooopss c'est merci en géorgien.

Bon, revenons à la ronde un (de boulot) Je signale au Chief qu'un remplaçant hongrois est entré dans la salle après le début de la ronde... Ah mais ce n'est pas normal, les policiers ont ordre de ne laisser entrer aucun joueur après l'heure : tolérance zéro pour le temps. Ashot quitte à nouveau la salle pour insister sur la consigne à l'entrée.

La chaise de Grichuk semble avoir un soucis, le... euh comment ça s'appelle ? ... non, pas le dossier, là où on pose ses fesses quoi ... euh l'espèce de coussin... bon, vous avez compris. Ben y tient pas bien. Faudra le changer, je le note.
La lumière me semble un peu vive, il faut dire que nous avons un lustre qui ne rentrerait pas dans mon salon (mais j'ai peut être cette sensation parce que j'ai peu dormi) :
Quel autre problème ?
Ah oui, le frigo ferait moins de bruit avec une cale.
Un joueur a demandé un tié (ça doit vouloir dire thé) à son capitaine, sans la présence de l'arbitre.
Les stickers pour afficher les résultats sont trop larges et doivent être redécoupés.
La jeune femme de l'organisation parle trop fort quand elle quitte son bureau.
Les tables commencent à être encombrées : Levon Aronian, par exemple a deux tasses à café et deux bouteilles d'eau vides, à côté de son échiquier. Faut-il demander aux capitaines de faire le ménage ?

Le Match Arbiter qui avait laissé entrer dans la salle un hongrois de trop tente de se rattraper. Il me fait signe qu'il va virer un joueur. Cet arbitre est bien déterminé à montrer ses petits bras musclés. Je l'arrête in extremis avant qu'il ne mette à la porte le capitaine chinois...
Je lui dis gentiment de s'occuper de "son" match et de ne pas faire de zèle : "don't do the malin, and occupe you of tes fesses".

Nous avions dit que la pendule comptait les coups...
Excusez-moi, je m'interromps parce que je viens de regarder par la fenêtre de ma chambre. En deux jours, le paysage a pas mal changé, dîtes-donc (entrez !)
Regardez plutôt (comme disait Mickey) à travers la fenêtre de ma chambre :


Kalifa, qui vient des Emirats Arabes Unis m'a dit qu'il n'avais jamais vu la neige, il est servi !
Je vous remercie pour votre patience, revenons à la ronde 1, et fermez cette fenêtre, on gèle ici.

Nous avions dit que la pendule comptait les coups... c'est à dire que les 30 min. supplémentaire se rajoutent automatiquement au 40e coup. Petit soucis à la ronde 1 (et ce fut le seul jusqu'ici), la pendule du 1er échiquier Chine-USA rajoute les 30 min au 39e coup !
OulaOula !!
Je regarde l'arbitre (je ne donnerai pas son nom, mais il n'avait jamais vu la neige), il m'appelle. Je lui dis de faire le réglage. Il n'est pas très sûr de lui. Régler une pendule le matin, pour tester, ce n'est pas la même chose que le faire en direct, pendant le championnat du monde, devant les joueurs, les capitaines et le chef adjoint (le chef nous laisse faire, inutile d'être à trois, inutile de rajouter de la pression. Il est bon le chef).
Mais le Match Arbiter panique, il m'interroge du regard, et me tend la pendule. Je refuse et le guide :
Laisse appuyé le bouton de droite.
Bien.
Fais défiler. Stop. Fais moins trois (on est au dizaine de minutes).
Bien.
Fais défiler. Stop. Pareil pour les Noirs.
Bien.
Non, continue. Oui, encore un peu. C'est le nombre de coups. Tu fais moins un.
Bien.
Voilà, tu valides. C'est parfait.
Très bien, et dans un temps raisonnable. Il pose la pendule, oublie de la redémarrer et retourne à sa place. Je relance la pendule discrètement.
Un peu plus tard, je le félicite pour son efficacité. Avec un peu de confiance, il sera parfait.

La visite du Président de la République/Fédération s'est bien passée. Dans 5 jours, il reçoit Vladimir Poutine et François Hollande (entre autres) pour la commémoration des 100 ans du génocide arménien (plus d'un million de morts).

La ronde se déroule sans incident notable.
Nous avons mérité de nous reposer. Le Chef doit encore saisir les résultats et les publier.
Nous discutons de l'attribution des matchs pour demain, et je me charge de les annoncer aux Matchs Arbiters :
Igor, tu arbitres Egypte-Israël, sur ces tables (n°2), et c'est le match n°5. Je m'attendais à ce que ce vénérable arbitre international de catégorie A (le plus haut niveau mondial), âgé de 67 ans, vivant à Saint-Petersbourg, me dise un simple "OK", mais il me posa une question particulièrement difficile : "Pourquoi ?"... "euh ... Parce que.. ça te suffirait comme réponse ?" Je ne lui dis pas ça, bien sûr. Je pourrais lui dire qu'il serait diplomatiquement difficile d'attribuer Israël à un Iranien, qu'il ne peut pas arbitrer la Russie, et donc cela bloque Margalita qui parle peu anglais. Les joueurs israéliens parlent tous russe, les autres arbitres parlent plutôt anglais. Mais je ne dis pas ça non plus. Je me souviens que les russes aiment les documents officiels. Je lui montre donc simplement la feuille des matchs imprimés, avec la table 2, le match 5 et son nom.
Il secoue la tête.
ouf.

Et bien allons dîner, nous terminerons la mise en place après le repas.


La ronde 2 aura-t-elle lieu ?
Le président de la République va-t-il repasser ? Et si oui avec quel fer ?
Va-t-il pleuvoir pour la venue de François Hollande ?
La Hongrie va-t-elle encore venir à 5 joueurs pour 4 échiquier ?

vous le saurez en suivant la suite de nos aventures...